La rentrée de septembre 2023 ressemble malheureusement aux rentrées précédentes. Les problèmes se multiplient à tous les niveaux, et quand l'ensemble des personnels demandent plus de moyens, l’Éducation Nationale leur en fournit moins.
Les situations se tendent partout, mais rien n'est fait pour aider les personnels à croire en un futur meilleur pour l’école publique.
Dans le 1er degré, 22 suppressions de postes ont eu lieu cette année. Le résultat : des classes avec des effectifs qui augmentent, quand tous les acteurs.trices du système éducatif préconisent une réduction des effectifs pour atteindre une meilleure réussite de tous.tes les élèves.
Le déficit de remplaçant.es se fait déjà sentir, et de nombreux.ses élèves ont donc perdu un nombre considérable d'heures d'enseignement après seulement 8 semaines de cours.
Les personnels se plaignent de manière exponentielle de situations de souffrance au travail, de manque de considération et d'incapacité à faire face aux difficultés.
Les arrêts se multiplient, les demandes de temps partiels, bien que presque systématiquement refusées, augmentent en flèche. Et il reste beaucoup de collègues qui ont abandonné l’idée même de faire une demande, en anticipant ce refus. Ces collègues seront, tout au long de l’année, dans un mal-être au travail et possiblement en arrêt maladie.
L'ensemble des personnels souhaiterait plus de temps pour préparer ses temps d'enseignement, plus de temps pour travailler en équipe et réfléchir collectivement aux meilleurs dispositifs dans le but d'amener les élèves à la réussite et l'émancipation. Plus de temps aussi pour ouvrir les établissements aux parents, avoir le temps de construire avec elles et eux le parcours de leurs enfants. Plus de temps pour se former, pour se légitimer dans leur métier et ainsi enrichir encore leur enseignement.
Face à ces besoins, le ministère a décidé, paradoxalement, de proposer aux enseignant.es volontaires de travailler d'avantage, au travers d'un « Pacte », qui n'est pensé que dans l'idée de boucher des trous, de permettre de « garder » des élèves, d'assurer à leurs parents que leurs enfants n'ont pas perdu trop d'heures d'enseignement. Or ce pacte ne vise absolument pas la réussite de tous les élèves.
Et surtout, ce pacte est clairement refusé par les enseignant.es. Seul.es 10% des professeurs des écoles l'ont signé. C'est un aveu d'échec de ce gouvernement qui ne fait que multiplier les réformes de destruction du service public d'éducation.
C’est également une nouvelle fois la démonstration du mépris des ministres successifs envers les enseignant.Es en insinuant que les personnels sont en capacité de travailler d'avantage, alors qu'en moyenne, ils et elles travaillent déjà près de 50h par semaine.
Le mépris est global et ne touche pas que les personnels enseignant.es.
Nos collègues AESH, a qui l'ont promet dans le vent un statut pérenne et revalorisé, sont toujours déconsidéré.es, et le sont même encore plus qu'avant.
Payé.es de manière ridicule, sans formation, mais à qui l'on répète toute l'importance de leur rôle pour faire fonctionner un projet d'école inclusive qui ne vise qu'à faire des économies.
Ces collègues sont déjà mobilisé.es depuis le début de l'année dans le département, et leur souffrance est énorme. Et maintenant, le gouvernement veut fusionner le statut d’AESh et celui d’AED, avec le statut d’ARE. Pense-t-il réellement que les collègues AED et AESH font le même métier ? Quelle nouvelle démonstration de mépris pour nos collègues, précarisé.e.s et pourtant essentiel.le.s à l’Ecole publique.
Pendant ce temps là, ce sont énormément d’élèves en situation de handicap qui attendent toujours d'être accompagnés par un.e AESH. Ces élèves, qui ont été reconnu.es comme nécessitant par la MPDH, sont laissés pour compte par notre société. L’État ne respectent pas leur droits d’être scolarisé.e.s dans les conditions d’apprentissage qui leur sont dues.
Nous souhaitons évidemment toutes et tous que l'Ecole soit inclusive et ouverte à tous et toutes. Mais aujourd'hui, l’école inclusive est devenue un slogan qui permet au gouvernement de se donner le beau rôle, pendant que des milliers d'enfants sont en souffrance et doivent faire face, seul.es, à leur handicap.
On nous répète sans cesse, et cela a été le cas dans cette instance il y a quelques mois, que le problème n'est pas le manque de moyens, mais le nombre de candidat.es pour le poste d'AESH.
Mais n'est-ce pas encore une fois du mépris que de ne pas comprendre que les conditions de travail et de salaire proposées aux AESH ne peuvent pas être considérées comme viables et engageantes.
Autre secteur où la rentrée a été chaotique, la rentrée des élèves allophones. Dans le 1er degré, plus de 100 élèves allophones sont en attente et n’ont pas de suivi. Il manque au moins 5 temps plein enseignant. De plus, quand le bulletin officiel explique les élèves allophones doivent bénéficier de 9h de prise en charge par semaine, la grande majorité des élèves ne sont pris en charge en moyenne que 2 à 3h par semaine. Les enseignant.es allophones ont géré comme ils et elles le pouvaient cette rentrée, faisant une nouvelle fois la démonstration de leur engagement, en s’organisant, entre elles et eux cette première période de l’année. Pour rappel, l’IEN en charge des allophones ainsi que la personne en charge de la coordination ont été démissionnaires de leurs fonctions en juin. Jusqu’à fin septembre, les enseignant.es ont organisé eux-mêmes, sur leur temps personnel, les prises en charge, sans orientation fixée par qui que ce soit.
Dans le 2nd degré, sous couvert de politique de mixité sociale, le département ferme des collèges publics et l’Éducation réduit les moyens de l'éducation prioritaire. On assiste à une liquidation des moyens REP + au collège, et il n'y a pas de réponses sur les moyens des écoles REP + qui en dépendent. Deviendront-elles des écoles orphelines ?
Cette politique avantage l'enseignement privé qui ne cesse de se développer alors même qu'il concentre les CSP + (68%) et que la mixité sociale y est marginale (10% de CSP défavorisées).
En 2024, la ville de Nantes comptera ainsi 20 collèges privés (40% d’élèves) contre 18 publics sans que les collèges privés soient associés au projet de mixité sociale.
Les collèges privés tirent profit de la politique de mixité sociale en laissant au public les élèves défavorisés (75% des boursiers), les élèves allophones, les segpa, les ULIS...
La quasi- totalité des personnels de Rosa Parks étaient en grève aujourd'hui ainsi que la quasi-totalité des personnels de la Durantière hier et aujourd'hui.
Un rassemblement devant le futur collège Vial a eu lieu ce midi, rejoints par des personnels de Jules Verne, Guisth'au, Victor Hugo et d'autres établissements.
La grève et le rassemblement d'aujourd'hui ont fait suite au rassemblement du 26 septembre et aux demandes des personnels et des familles, inlassablement répétées depuis le mois d'avril.
Les personnels n'ont toujours pas de réponses sur les conditions de transferts et/ou de mutation, il n'y a aucune garantie envers les familles et les élèves si ce n'est 25 élèves en 6è à Vial, collège qui aura vraisemblablement un IPS élevé. Rien n'est anticipé pour créer des conditions d'apprentissages et de réussites pour les élèves déplacés vers le centre -ville, le ruissellement scolaire semble être la formule magique pour régler les difficultés.
La sectorisation se fait au mépris des demandes des familles des différents quartiers impactés (double sectorisation avec le Hérault pour les élèves de Rosa Parks ; double sectorisation Serpette/Berlioz demandée par les parents de Léon Say).
Le refus de contrôler les élèves hors secteurs (sur des fraudes aux adresses), qui pourrait être un levier de mixité sociale est systématiquement écarté sans justification.
Les familles refusant le déplacement en bus de leurs enfants risquent de grossir les rangs de l'école privée, signant l'échec de ces choix politiques. L'évitement scolaire va se perpétuer.
Les élèves de Rosa Parks qui prendront le bus vers le centre-ville, se retrouveront sans les moyens humains et pédagogiques qui les soutenaient en REP +, séparés de leurs amis car répartis dans différents établissements.
Le Conseil scientifique de l’Éducation Nationale a déjà conclu que la politique de mixité sociale n'entraînerait pas d'amélioration des résultats scolaires, on peut douter qu''elle améliore le bien être des élèves.
Ces choix politiques sont ainsi des choix budgétaires : supprimer des moyens REP + et créer des gros collèges à 700 ou 800 élèves. C'est l'abandon des catégories populaires par le service public d'éducation et la communication n'y changera rien.
Mais aujourd'hui les personnels sont dans le flou, et les familles des élèves également. Encore une fois, il est difficile de penser que cela n'est pas juste une question budgétaire, permettant ainsi de diminuer les moyens qui seront alloués au nouveau collège, qui ne sera plus en zone prioritaire. Les personnels sont une fois de plus les pions qui vont être déplacé.es et qui vont perdre des moyens. Les parents des élèves des quartiers populaires vont être celles et ceux qui vont devoir s'organiser différemment, s'adapter à un système qui lui, ne s'adapte jamais à elles et eux.
Et pendant ce temps-là, d’autres collègues de collèges nantais se battent, comme chaque année, pour reconnaître la nécessité à entrer dans le dispositif d’éducation prioritaire. Aujourd’hui quasiment la totalité des personnels du collège de la Durantière sont en grève pour revendiquer l’insertion dans le réseau Rep+. Comme trop souvent, ils et elles, porté.es par l’envie de donner à leurs élèves les meilleures chances de réussite, ne sont pas écouté.es, et voient leurs conditions de travail dégradées. Nous tenions à leur apporter tout notre soutien dans cette lutte juste et nécessaire pour donner à tous.tes les élèves les mêmes chances de réussir leur passage au collège.
Il serait difficile aussi de ne pas parler de la rentrée 2023 sans rappeler qu'une fois de plus, plutôt que de traiter des questions soulevées par les personnels, notre ministre à décidé de partir en guerre contre l'abaya. Il a décidé d'en faire un point central de sa rentrée médiatique, ce qui lui permet de faire oublier l'ensemble des besoins prioritaires pour que l’Éducation nationale fonctionne mieux, avec des personnels qui peuvent travailler correctement et se sentir légitimes dans leurs fonctions .
C'est aussi une manière de plus, sous couvert de laïcité, de fracturer notre pays en ciblant une partie de la population et de contrôler la tenue vestimentaire des jeunes filles.
SUD éducation 44 le répète : l’Ecole publique a besoin de moyens, et vite, pour pouvoir permettre l’émancipation de tous et toutes.