CAPD Recours PPCR – 12 mars 2024
Déclaration liminaire SUD éducation 44
Monsieur le Directeur Académique,
Mesdames, Messieurs les membres de la CAPD de Loire-Atlantique,
L'éducation n’échappe pas aux logiques libérales et autoritaires qui régissent la société dans son ensemble. Des décennies de mesures antisociales mettent quotidiennement à mal les personnels. Aujourd'hui en France, un-e enseignant-e démissionne toutes les trois heures. Un chiffre qui a été multiplié par 5 en l'espace de 10 ans.
Comment ne pas voir en ces données unsignal alarmant ? Comment ne pas les mettre en lien avec la réalité de conditions de travail toujours plus dégradées ?
Classes surchargé-es, absences quasi-systématiquement non-remplacées, manque de moyens pour une réelle inclusion des élèves, surcharge mentale liée à la multiplication des missions administratives toujours plus déconnectées des réalités du terrain... Comment les personnels de l'éducation peuvent-ils seulement tenir sans mettre leur santé en péril ?
L'explosion du nombre de fiches du Registre de Santé et Sécurité au Travail (près de 1200 en un an dans le département) n'est qu'un indicateur de plus venant accréditer le constat de failles structurelles béantes.
C'est dans ce contexte de souffrance et d'épuisement au travail que nous sommes évalué.es trois fois dans notre carrière par une hiérarchie qui a peu à peu perdu le sens de la réalité d’une classe. Pour Sud éducation, le recours au PPCR constitue un outil injuste et arbitraire utilisé par la hiérarchie. Depuis son instauration, le PPCR et ses « rendez-vous de carrière » suscitent
incompréhension, frustration et colère chez nos collègues, dans un contexte où nombre d’entre elles et eux se sentent déconsidéré·es voire méprisé·es.
Incompréhension, frustration et colère pour de multiples raisons :
- entretiens infantilisants,
- pratiques d’évaluation et d’autoévaluation en décalage avec les enjeux pédagogiques et la
prise en compte de l’intérêt des élèves,
- incohérences administratives dans les bilans des rendez-vous de carrière,
- logiques de quotas qui écartent de nombreux·ses professeur·es de la possibilité d’un
avancement plus rapide et donc, d’une progression salariale.
Force est de constater que le PPCR creuse les écarts de salaires entre les personnels, alors qu’il avait initialement pour but de relancer les carrières et les rémunérations !
Par ailleurs, le PPCR met les enseignant·es sous pression de la hiérarchie et installe une concurrence délétère entre collègues. S’il constitue une tentative d’imposer des techniques de managements aux corps des fonctionnaires, il est aussi la porte ouverte au favoritisme. En renforçant le rôle de la hiérarchie, les « rendez-vous de carrière » posent la question de leur contrôle par les instances paritaires afin d’éviter l’arbitraire. Et tout cela pour des augmentations de salaire très modérées, réservées à un nombre réduit d’enseignant·es, et qui ne compensent pas les pertes de salaire enregistrées depuis plus d’une décennie par le gel du point d'indice !
Et ce n’est pas le « Pacte » qui va arranger la situation en matière de revalorisation salariale. En effet, il s’agit d’une prime et non d’une augmentation de salaire, prime dont seraient seuls bénéficiaires les personnels ayant accepté d’exercer un bouquet de missions supplémentaires !
Pour SUD éducation, ce projet est scandaleux. Tout d’abord, il dégrade encore un peu plus les conditions de travail, dans un contexte où le temps de travail et les missions demandées aux enseignant·es explosent, au lieu de reconnaître les missions déjà exercées. Ensuite il renforce l’autorité des chef·fes d’établissements, et va diviser les équipes, par une concurrence des collègues pour l’obtention du « Pacte ». Enfin il renforce les inégalités femmes/hommes, entre les personnels à 4 jours et 4 jours 1/2 et entre les personnels handicapés et les personnels valides car les femmes et les personnels handicapés prennent déjà très nettement moins de missions supplémentaires.
C’est pour cela que SUD éducation revendique l’abrogation du PPCR et l’abandon des « rendez- vous de carrière » et des inspections, qui ne sont que des contrôles épisodiques, partiels et subjectifs de l’inspecteur·rice.
SUD éducation revendique une évaluation pédagogique entre pairs et une démarche collective d’échange de pratiques, en lien avec une formation continue de qualité.
SUD éducation refuse un salaire au prétendu mérite et revendique l’avancement pour toutes et tous au rythme le plus rapide ainsi qu’une hausse des salaires de tous les personnels de l’Éducation Nationale notamment travaillant dans les établissements scolaires publics. Pour SUD éducation, cette hausse des salaires doit se baser sur une augmentation indiciaire des traitements, et non sur des primes, tout en prenant en compte l’inflation, et doit être déconnectée de tout système d’évaluation inégalitaire des personnels à l’image du PPCR.
Dans l’immédiat, SUD éducation exige que le montant de l’enveloppe « Pacte» soit versé dans la revalorisation inconditionnelle de tous et toutes Sud éducation se montre aussi résolument opposé à l'école du tri social qui exclut toujours plus tôt les enfants qui occupent des positions les plus dominées dans l'espace social. Nous sommes en effet convaincu·es que le rôle de l’école n’est pas de renvoyer les élèves à leurs difficultés et de les assigner à une place sociale mais bien d’agir au sein de l’école pour leur permettre d’apprendre, d’évoluer, de se transformer.
Cette logique classiste et méritocratique est parfaitement symbolisée par cette volonté absurde de vouloir mettre en place des uniformes dans les écoles : "plutôt que de s'attaquer véritablement aux inégalités sociales, tâchons de les masquer." Avec l’argent investi dans le SNU et la mise en place de l’uniforme à l’école, 130 000 postes de professeur.es auraient pu être créés Ou si nous
utilisions 2 milliards d’euros entre les 4,5 et 5 milliards pour la mise en place des uniformes et du SNU, tout.es les AED et AESH auraient une augmentation de 800 euros. Pour ces dernièr-es, la priorité n'était-elle pas de créer - enfin ! - un statut de la fonction publique ?
Rajoutons à cela la suppression de 25 postes de professeur-es des écoles en Loire Atlantique, alors même que la baisse démographique aurait pu être utilisée pour améliorer sensiblement nos conditions de travail en abaissant les effectifs par classe et en mettant en place des conditions de remplacement enfin acceptables, le ministère fait le choix délibéré d’accroître nos difficultés.
Aujourd’hui, face à ces attaques répétées, l’École riposte.
Aujourd'hui, les personnels relèvent la tête et seront massivement en grève les 19, 20, 21 et 22 mars pour leurs conditions de travail, pour les conditions d'apprentissage des élèves et pour la construction d’un service public de l'éducation émancipateur - pour toutes et tous.